Analyse critique du Doc 4

Le document 4, intitulé « L'Europe sans défense : du blocus de Berlin à Sarajevo », issu de « La Communauté Européenne de Défense, leçons pour demain ? », est-il adéquat pour compléter un ensemble de documents aidant à élucider la question de recherche : « Quels facteurs ont pu contribuer à l'échec de la CED en 1954?»

Le corrigé officiel de l'épreuve du CESS déclare ce document non pertinent, évoquant un non-respect du thème ou du lieu. Cependant, certaines justifications proposées par les élèves pourraient sembler convaincantes. Par conséquent, on pourrait modérer cette affirmation catégorique et proposer des arguments pouvant valider la pertinence de ce document.

En effet, il est possible de percevoir ce document comme pertinent à la lumière de la question de recherche ; en se basant sur le recueil de documents et en procédant à une analyse critique externe et interne du document en question, celui-ci semble être adéquat pour contribuer à l’analyse des facteurs ayant pu conduire à l'échec de la CED en 1954.

Voici une analyse critique basée sur des justifications fournies par des élèves lors de l'examen ainsi que sur une critique historique plus poussée.

Critique du Document n°4 du CESS 2023 en Histoire

Une critique interne du document nous apprend que le texte parle de la Conférence intergouvernementale de 1996 qui « replace en pleine actualité le problème de la défense européenne. », le problème étant que la CED a échoué en 1956 et qu’il n’existe pas de politique commune de défense européenne, si la conférence de 1996 replace ce problème dans l’actualité de l’époque (Conflits Yougoslavie), on peut dire que le texte parle des facteurs d’échec de la CED (= le problème, il n’y a pas de CED actuellement pour des raisons historiques).

Le texte dit également : « pendant 40ans, la menace soviétique avait pu créer un réflexe de réponses communes, automatiques, obligatoires. » Or, nous savons que la menace soviétique peut être considérée comme un facteur d’échec de la création de la CED dans les années 50 car, comme le dit le texte, si les réponses sont communes automatiques et obligatoires, il n’y a pas besoin de créer une communauté de défense, puisque les réactions ont quand même lieu de manière commune. Le texte cite donc indirectement un des facteurs de l’échec de la CED de 1956. Ce qui semble nous prouver sa pertinence à l’égard de notre question de recherche initiale.

Finalement, en posant la question rhétorique : « progrès linéaire ou éternels recommencements de l’idée de défense européenne », l’auteur introduit un raisonnement (qu’il tiendra sûrement dans la suite de son texte) qui peut parler des facteurs qui se répètent dans le temps (durant les 40 ans passés) et donc qui sont des facteurs qui reviennent régulièrement, en 1956 comme durant les 40 ans qui ont suivi, et qui peuvent contribuer à expliquer l’échec d’une politique de défense commune (éternels recommencements) ou une avancée notoire (progrès linéaire – en se basant sur les erreurs du passé).

Le document

Par ailleurs, hors contexte de l’épreuve du CESS pour les élèves, on peut critiquer la procédure de choix et de présentation du document dans le portefeuille.

En effet, la sourcé référencée est celle d’un livre qui regroupe les textes de sept conférences faites par des universitaires sur le thème de la défense de l'Europe à travers l'histoire (de la Grèce antique à l'après-guerre froide). Quelle Europe ? Quelles frontières ? Quelles menaces ? Quelles parades ? Quels enseignements pour la défense de demain ?

En lisant le référencement de ce livre, on peut trouver l’extrait suivant qui stipule clairement que le livre traitera bien des facteurs d’échec de la CED en 1956 : 

« Il était particulièrement bienvenu, sur l'initiative d'un des meilleurs experts belges de l'histoire de la construction européenne, de réaliser cet exercice consistant à réexaminer l'histoire de ce projet mort-né que fut l'armée européenne dans les années cinquante, avec d'autant plus d'intérêt qu'elle peut aider à comprendre en partie les enjeux de la sécurité européenne aujourd'hui et demain. Il faut également éviter de tomber dans les mêmes pièges si d'aventure l'Union européenne devait acquérir les moyens régaliens collectifs de sa sécurité. Comprendre le passé pour aider le présent, même si la situation politique et l'environnement diplomatique et militaire à l'époque n'ont plus rien à voir avec le champ post-guerre froide et l'extrême importance aujourd'hui de la gestion des. Même si, par ailleurs, les années cinquante étaient fortement inspirées par un nationalisme alimenté par les effets de la guerre totale dont l'Europe venait de sortir meurtrie. Mais la question soulevée par le projet d'armée européenne puis de CED peut nous interpeller car aujourd'hui, « les technocrates, dans leur écrasante majorité, ne prennent pas en compte l'histoire et encore moins celle des mentalités » (Dumoulin). Or, celles-ci peuvent encore, aujourd'hui, jouer un mauvais tour au processus de montée en puissance de l'Union européenne. »

Dumoulin, A. (2001). Compte rendu de [DUMOULIN, Michel (dir.). La communauté européenne de défense, leçons pour demain ? Bruxelles, Presses interuniversitaires européennes-Peter Long, Euroclio n°15, 2000, 430 p.] Études internationales, 32(2), 388–389. https://doi.org/10.7202/704300ar

Pour terminer, il convient de préciser que la sourcé mentionnée pour le texte de Vaïsse présent dans le portefeuille de documents n’est pas la source initiale. Le texte a été publié pour la première fois dans le mensuel « l’Histoire », n°198, Avril 1996. Dans cette source initiale, l’auteur, monsieur Vaïsse, introduit son texte par quelques lignes qui ne sont pas reprises dans le document du CESS et qui annoncent, elles, que le texte (en entier) de Vaïsse peut être pertinent pour aborder les facteurs qui ont contribué à l’échec de la CED en 1956. Quoi qu’il en soit, le document présenté est tronqué et il eût fallu le mentionner par le typographie adéquate « […] »